La peur de penser l’Europe

Authors

  • Joanna Nowicki

DOI:

https://doi.org/10.13135/2611-853X/2787

Keywords:

captive mind, fear to think, europeanity, conformism, reviewed humanism, pensée captive, peur de penser, européanité, conformisme, humanisme revisité

Abstract

Albert Camus’1948 “century of fear” is strikingly meaningfultoday. Philippe Breton suggeststhat our centurydoes not mark the end of propaganda but on the contrary, signals a new era of major manipulations. Today in Europe, we may observe that some ancient fears are returning. Instead of debating them, weremain silenteither because we do not trust others orbecause we feeldiscussions are filled with ideology. This is the main idea developed in this presentation.

To illustrate this point, thisarticle presents the analysis of an important debate, which took place in Poland after Marcin Krol’s bookEurope Facing Its End was published. The author identifies the reasons for this so-called“end of Europe” (as aninfluentialcivilization and as an institution, including the EU) by showing four elements of disruption. All of them can be associated to fear.

We then try to analyzethe reasons for what Camus calls “the silence”, i.e. the lack of debate about Europe, particularly in France, where many topics are avoided because of the fear of dealing with controversies. The problem of the influence of different ideologies (Bourdon) on one hand and the necessity to find consensus on the other, are interesting from our point of view. Instead of being a factor of the new Europeanconscience,this situation reinforcesEuropean“non-communications” (Wolton). The attitude towards Russia is here particularly important in this respect.

We couldmaybe definethe contemporary “captivemind” (Milosz) as an attitude of those who are not afraidof the consequences of non-conformist ideas butare afraid to think forthemselves, freely (Dewitte). If the Belgian philosopher’s point were right, we hadbetter return to thinkers suchasWat, Havel, Milosz, Arendt, Camus and many others, because they produced a considerable amount of work on the relationship between fear and freedom of thinking.

 Keywords: captive mind, fear to think, europeanity, conformism, reviewed humanism

Résumé

L’actualité des propos d’Albert Camus dansLe siècle de la peur,  qui  date de 1948, est troublante. Philippe Breton suggère que nous vivons dans une époque non pas de la fin des propagandes mais au contraire dans celle des grandes manipulations. Aujourd’hui, nous constatons un retour des peurs anciennes en Europe et,au lieu d’en débattre,nous retombons trop souvent dans le silence par manque de confiance dans les autres ou à cause de l’omniprésence de l’idéologisation  des échanges. Telle est la thèse que notre article soutiendra. Pour l’illustrer, nous nous appuierons d’abord sur l’analyse d’un débat public qui a eu lieu en Pologne autour de l’ouvrage de Marcin Krol, L’Europe face à sa fin,qui a eu un fort retentissement médiatique en 2012. L’auteur y propose une analyse de cette « fin de l’Europe », à la fois institutionnelle et en tant que civilisation influente,et identifie quatre points de fracture que l’on peut tous associer aux peurs. Nousnous interrogerons ensuite sur le silence dont parle Camus, c’est-à-direl’absence d’undébat sur l’Europe, notamment en France où certains sujets ne sont pas traités par crainte de mal s’entendre. Nous nous intéresserons à la problématique de l’idéologisation du débat public (Bourdon) face à la domination du consensus devenu la norme, surtoutdans ces domaines qui, à notre avis, renforcent les incommunications européennes (Wolton) au lieu de contribuer à l’émergence d’une conscience européenne. À cet égard, l’attitude envers la Russie est parlante.« La pensée captive » (Milosz) contemporaine consisteraitalors non pas à avoir peur des conséquences d’une pensée non conforme à ce qui est autorisé, mais à ne pas autoriser la liberté réelle de penser (Dewitt). Si la thèse du philosophe belge était vraie, on aurait intérêt à revenir aux écrits de penseurs tels que Wat, Havel, Milosz, Herbert, Arendt, Camus et tant d’autres qui ont beaucoup réfléchi sur le lien entre la peur et la fin de la liberté de pensée.

 Mots-clés : pensée captive, peur de penser, européanité, conformisme, humanisme revisité


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