L’édifice juridico-politique du plurilinguisme européen – théorie et pratique

Authors

  • Christian Tremblay

DOI:

https://doi.org/10.13135/2611-853X/10807

Abstract

Les langues en Europe pourraient n’être qu’un enjeu culturel, mais elles sont un enjeu pleinement géopolitique
et l’objet de luttes sourdes et bien réelles au sein même des institutions qui tournent autour du caractère hégémonique de l’anglais. Deux paires de points de vue s’opposent selon deux axes. Le premier axe est
fonctionnel et repose sur la notion de langue et de langage. Sur cet axe, le point de vue technocratique ne voit
dans les langues qu’un outil, et le fait de n’utiliser qu’une langue permet de gagner beaucoup de temps,
d’argent et d’efficacité. À l’opposé, le point de vue culturel fait des langues et de leur diversité, la base même
des identités, et surtout de la richesse intellectuelle et culturelle des pays européens et de l’Europe tout entière.
L’autre axe est géostratégique. Une partie des pays européens s’identifie à l’Occident, ou une certaine idée de
l’Occident, conduite par les États-Unis, et pour eux l’anglais devraient être plus qu’une langue commune,
c’est-à-dire, la langue officielle de l’Union européenne. D’autres pays européens, ou d’autres tendances poli-
tiques au sein des pays européens ne voient pas l’Occident ni ses relations avec le reste du monde de la même
manière et souhaitent que l’Europe et les nations qui la constituent s’affirment en tant que telle. Tel est le cadre
général dans lequel se situe le régime linguistique de l’Union européenne dont la fixité contraste avec l’intens-
ité des luttes dont il est l’enjeu. Nous voulons dans cet article donner les fondements juridiques du régime
linguistique de l’Union européenne, mais aussi leurs limites sur fond d’enjeux stratégiques.
En partant du texte fondateur que constitue le règlement N°1 du 15 avril 1958, ses forces et ses faiblesses, nous
mettrons en perspective les différents textes postérieurs qui élargissent le fondements juridiques du plurilin-
guisme européen, pour terminer par une réflexion sur les voies et moyens de contenir les tendances hégémo-
niques de l’anglais dans les pratiques institutionnelles.

Mots-clés: Langues, Régimes, Scénario, Lutte, Identité, Anglais, Position

European languages could be considered not as a mere cultural issue but as a real geopolitical issue, and be the
subject of secret and absolutely real struggles within the very institutions concerning the hegemonic position
of English. Two points of view are opposed on two sides. The first is functional and is based on the concepts of
Langue and Language. On this axis, the technocratic point of view considers language as a tool, and using only
one language saves a lot of time, money and efficiency. On the contrary, the cultural point of view considers
idioms and their diversity as the actual basis of identities and also, above all, of the intellectual and cultural
richness of European countries and Europe as a whole. The other axis is geostrategic. Some European countries
self-identify with the Occident, or a particular idea of it, headed by the USA, and for them English should be
more than a common language, i.e. the official language of the EU. Other European countries or other political
trends in these countries do not see the Occident or its relations with the rest of the world in the same way, and
hope that European Union and its member states will assert themselves as such. In this general scenario lies the EU's language regime, whose static nature contrasts with the intensity of its struggles. This article aims to give the legal foundations of the EU's language system, but also their limits on the basis of strategic issues.

Keywords: Languages, Regimes, Scenario, Struggle, Identity, English, Position

Published

2024-06-30

Issue

Section

Miscellaneous